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    Qu’appelle-t-on les Manuscrits de la mer Morte ?

    La découverte des Manuscrits de la mer Morte (en anglais Dead Sea Scrolls) est considérée comme l’une des trouvailles archéologiques les plus importantes du XXᵉ siècle. Entre 1947 et 1956, environ 900 manuscrits ont été retrouvés dans des grottes situées le long de la rive nord-ouest de la mer Morte, près du site de Qumrân. Ces textes comprennent des livres bibliques, des règles communautaires, des hymnes d’action de grâce (appelés Hodayot — הוֹדָיוֹת, de la racine hébraïque ידה yadah, « confesser, louer, rendre grâce »), mais aussi des versions réécrites de récits scripturaires déjà connus.

    Ces découvertes ont transformé notre compréhension du judaïsme du Second Temple (environ 500 av. J.-C. – 70 apr. J.-C.) et ont offert aux chercheurs un témoignage direct sur la transmission, l’interprétation et la préservation de la Bible hébraïque.

    Un bond de mille ans dans l’histoire des manuscrits bibliques

    Avant la découverte de Qumrân, les plus anciens manuscrits bibliques hébreux dont nous disposions provenaient du texte massorétique daté d’environ 900 apr. J.-C. (notamment le Codex d’Alep et le Codex de Leningrad). Or, les Manuscrits de la mer Morte, datés entre 250 av. J.-C. et 68 apr. J.-C., repoussent l’histoire matérielle des textes bibliques de près d’un millénaire.

    Parmi ces fragments, on a identifié des portions de presque tous les livres bibliques, à l’exception d’Esther. Les différences constatées entre les manuscrits de Qumrân et les versions massorétiques ultérieures sont minimes : elles concernent surtout l’orthographe (ketiv), des variantes de mots proches ou de légères omissions. Ces écarts n’altèrent généralement pas le sens théologique ou narratif. Au contraire, la remarquable cohérence entre les copies, malgré un écart de plusieurs siècles, témoigne du soin extrême avec lequel les scribes juifs ont transmis les Écritures.

    Un témoignage sur la vie religieuse du judaïsme ancien

    Les manuscrits de Qumrân ne se limitent pas aux textes bibliques. Ils incluent aussi :

    • des textes communautaires, comme la Règle de la Communauté (Serek ha-Yahad), qui décrit l’organisation d’un groupe probablement essénien ;

    • des hymnes et prières, notamment les Hodayot, exprimant la piété et l’attente eschatologique d’un salut divin ;

    • des écrits parabibliques, où des récits connus (Genèse, Exode, etc.) sont réécrits ou interprétés selon la théologie propre au groupe de Qumrân.

    Ces documents révèlent un judaïsme pluriel, marqué par des courants différents (pharisiens, sadducéens, esséniens) et une attente messianique forte. Ils aident ainsi à mieux comprendre le contexte religieux dans lequel Jésus et ses disciples ont vécu.

    Une découverte toujours en cours

    À ce jour, seule une partie des grottes a été fouillée, et de nouvelles découvertes continuent d’être faites. En 2021, des fragments supplémentaires ont été mis au jour dans la « Grotte de l’Horreur » (dans le désert de Judée), contenant notamment des passages des prophètes Zacharie et Nahum en grec (Israel Antiquities Authority, 2021). Cela montre que l’histoire des Manuscrits de la mer Morte n’est pas close et que d’autres trésors textuels pourraient encore attendre d’être révélés.

    Conclusion

    Les Manuscrits de la mer Morte constituent un témoin exceptionnel de la fidélité de la transmission biblique, tout en ouvrant une fenêtre unique sur la diversité religieuse du judaïsme du Second Temple. Ils confirment la remarquable stabilité du texte biblique sur des siècles et enrichissent notre compréhension du contexte historique et spirituel dans lequel s’inscrit la Bible.

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    Sources :

    • E. Tov, Textual Criticism of the Hebrew Bible, Fortress Press, 2012.

    • G. Vermes, The Complete Dead Sea Scrolls in English, Penguin Classics, 2011.

    • Israel Antiquities Authority, communiqué de presse sur la découverte de 2021 : iaa.org.il